
Une école libre polonaise en France occupée
"En août 1978, est fondé à Varsovie un Comité de rédaction de l’histoire du lycée Cyprian Norwid de Villard-de-Lans. Tadeusz Łepkowski, élève au lycée en 1943-1945, en prend la présidence, est choisi comme rédacteur, commence à rassembler informations et documents.

Une école libre polonaise en France occupée
Livre • 2013
Le projet met plus de dix ans à se concrétiser. Un questionnaire est diffusé, auquel répondent une quarantaine d’anciens. Łepkowski veut absolument revenir à Villard et Grenoble, y rencontrer anciens et autres acteurs, y consulter les archives. Il a beaucoup de mal à organiser ce voyage et le réalise, enfin, en octobre 1988. Il s’ouvre à l’un de ses anciens professeurs du lycée installé à Villard, son « Cher professeur Malbos », sur les difficultés du dit voyage et sur celles, plus générales, qu’il rencontre pour achever l’ouvrage. Il sait qu’il est contesté par certains anciens qui ne digèrent pas qu’il ait pu faire partie de la nomenklatura communiste. Il refuse de céder à ceux qui souhaiteraient qu’il publie une hagiographie. « Croyez-moi, je fais tout pour terminer l’histoire du lycée. Les collègues non-historiens — ce qui est compréhensible — veulent avoir le texte le plus vite possible (une sorte de mémoires écrites les larmes aux yeux : tout était excellent, etc.). Je ne peux pas écrire de cette façon-là. Cela doit être une œuvre scientifique, une œuvre écrite non pour pleurnicher pour la postérité, mais pour dire la vérité, presque toujours complexe. »
Reste à trouver des fonds pour publier le livre. Les anciens mettent la main à la poche, ainsi qu’une association Polonia. Łepkowski revient en France en juillet 1989, à Paris, invité à célébrer le bicentenaire de la Révolution française. L’histoire du lycée est quasiment bouclée. Le texte est remis à l’imprimeur en septembre. La Pologne vit des changements et des mutations extraordinaires. Łepkowski est surchargé de travail et préside la commission Solidarność de l’Académie des sciences. Il décède brusquement le 16 décembre 1989. Son livre paraît quelques semaines plus tard.
À propos de cette édition
Dès la parution du livre de Tadeusz Łepkowski en Pologne, il a été question de traduire en français et de publier ce que la plupart des anciens considéraient être le texte le plus abouti sur l’histoire de leur lycée, leur « bible ». Vaste projet qui demandait qu’on y consacre moyens humains et financiers. Le rêve ne devint réalité qu’en 2007, quand à la tête de l’association des anciens élèves une nouvelle équipe trouva énergie et fonds pour avancer. Ce n’était qu’un début et il fallut cinq ans pour aboutir. Merci au traducteur, Nicolas Véron, qui a su rendre fluide la lecture d’un texte polonais parfois un peu lourd !
Cette équipe envoya le manuscrit français à une dizaine d’anciens élèves en sollicitant leurs remarques. Quelques erreurs marginales furent signalées et corrigées. Quelques commentaires amers furent reçus, reprochant à Tadeusz Łepkowski sa partialité : encore aujourd’hui, tout n’est pas apaisé entre ceux qui rentrèrent au pays et se « compromirent » avec les dirigeants de la Pologne « populaire » et ceux qui choisirent de faire de leurs convictions politiques et patriotiques leur priorité. D’autres commentaires, élogieux ceux-là, furent aussi reçus : le Łepkowski reste bien l’ouvrage de référence sur le lycée polonais, le seul écrit par un historien.
Les deux principaux reproches faits au livre de Tadeusz Łepkowski sont de passer sous silence ou de n’évoquer que très marginalement deux faits : le passage en Grande-Bretagne de presque cent élèves et professeurs pour y rejoindre l’armée polonaise ; la décision d’une trentaine d’élèves de ne pas suivre le lycée à Paris une fois qu’il eut fermé ses portes à Villard, mais d’aller passer leur baccalauréat à La Courtine, dans le Larzac. Ces deux sujets sont développés en fin d’ouvrage sous les titres Les départs vers Londres et Ceux qui ont dit non à Wrona.
Publié par l’association — 370 pages, nombreuses notes en bas de page — En vente à la Maison du Patrimoine de Villard-de-Lans et auprès de notre association — 19 € plus frais d’envoi éventuels.