3.6.1 « Exigeant et compréhensif à la fois. »
—Adam Skinder, élève. Notre école, 2017, d’après Mój Villard de Lans, 1978.
Grand, énergique, toujours souriant et prêt à plaisanter, recherchant volontiers la compagnie des anciens soldats que nous étions, Bronisław Bozowski était envers nous exigeant et compréhensif à la fois. Nous le voyions tous les jours, coiffé de son grand béret basque et emmitouflé dans son écharpe, arrivant à l’hôtel du Parc après la messe du matin ou regagnant son logis dans le haut du village. Il fut affublé très peu de temps après son arrivée du surnom de Bozower, et je ne connais personne aujourd’hui encore qui ne l’appelle ainsi, mais toujours avec un profond respect. Lui-même ne semblait d’ailleurs pas mécontent de ce sobriquet.
Bozower mettait à profit les cours de morale pour nous enfoncer dans le crâne les règles éthiques en insistant sur le rôle de l’individu dans la société, sur ses devoirs et ses responsabilités vis-à-vis de lui-même et d’autrui. Il truffait ses cours d’exemples, de citations, dirigeait le débat de manière à ce que celui-ci aboutisse à la conclusion qu’il avait arrêtée à l’avance. Il nous répétait sans cesse que l’homme ne peut se borner à être un simple consommateur de biens, qu’il doit être un créateur qui se donne tout entier à son travail afin d’amener le règne du Bien sur la terre. Le travail, encore le travail, toujours le travail : seul le travail ennoblit l’homme ! Pour moi, aimait-il à dire, travailler est un plaisir ! Ce qui lui attirait immanquablement cette réplique : Mais l’homme ne vit pas que pour le plaisir ! Et c’est alors que la discussion s’enflammait !
Bozower honorait toute personne en qui il voyait un Polonais véritable, un homme digne de ce nom. Ainsi un jour notre camarade W. W., qui fut plus tard ministre de la Pologne populaire, lui dit qu’en tant que communiste il n’était pas croyant, mais qu’il combattrait sans relâche pour la patrie en tant que Polonais. Bozower lui en donna acte : Je sais que vous êtes patriote et je le respecte. Nous n’avons pas à faire de différences entre nos convictions du moment qu’elles sont pures.