3.5.1 « C’était un excellent élève particulièrement doué pour les langues. »
—Wanda Dilingier, élève. Des Résistants polonais en Vercors, 2011.
Quand Jerzy Dilingier — mon frère — est né, en 1924 à Pont-à-Mousson, notre père Wladysław travaillait à la Fonderie de la ville. Plus tard, il fut convoyeur pour un bureau de voyage de Strasbourg qui s’occupait des mineurs venant de Pologne, puis employé à la Banque Polonaise PKO (Polska Kasaï Opieki) à Metz.
Juste avant la guerre, Jerzy étudiait au lycée de Metz et à l’école polonaise de la paroisse Sainte-Ségolène. C’était un excellent élève particulièrement doué pour les langues — anglais, allemand — et le commerce. Il parlait aussi le polonais, la langue que nous utilisions à la maison. Il appartenait à l’organisation des scouts polonais, Harcerstwo. Quand la guerre éclata, notre père, grand patriote, s’engagea immédiatement dans l’armée polonaise du général Sikorski.
Cet été 1940, les Allemands annexèrent l’Alsace et la Lorraine et envahirent Metz. Un matin de septembre, ils frappèrent à notre porte et nous donnèrent deux heures pour prendre chacun une valise et 60 francs (30 euros en 2022). Ils nous menèrent à la gare et nous rejoignîmes un convoi sans savoir où nous allions. Jerzy était alors en vacances chez une tante à Pont-à-Mousson. Comment le prévenir de ne surtout pas rentrer à la maison ? Heureusement, le train passait par cette ville. Quand il traversa la gare au ralenti, nous jetâmes un mot par la fenêtre, le chef de gare le récupéra et le transmit à Jerzy. À Lyon, on nous débarqua. Notre père avait refusé de partir en Angleterre tant que nous étions en France. Au consulat de Pologne de Lyon, nous apprîmes qu’il travaillait à Toulouse pour la Croix-Rouge polonaise. Nous le retrouvâmes dans la Ville Rose. Plus tard, toujours par l’intermédiaire de la Croix-Rouge polonaise, Jerzy put passer la ligne de démarcation et il rejoignit ainsi la famille. À la rentrée 1942, sur les conseils du directeur de la Croix-Rouge, Jerzy partit pour le lycée polonais de Villard. Je le suivis en 1943.