Infrastructure et financement
Le statut juridique du lycée est difficile à définir avec précision. Il s’agit en effet d’un établissement scolaire étranger, privé, doté de sa propre administration et de ses propres programmes, mais contrôlé sur le plan pédagogique par le ministère français de l’Éducation nationale.
La Croix-Rouge polonaise agit au nom du gouvernement polonais en exil. Elle prend en charge la location des bâtiments et les met à disposition du Service de Contrôle Social des Étrangers (SCSE). L'Hôtel du Parc et du Château devient officiellement le « centre n° 56 bis du SCSE ». Quand, en juin 1941, la Croix-Rouge tombe sous la coupe des Allemands, un Groupement d'Assistance aux Polonais en France (GAPF) est formé de toutes pièces pour la remplacer. En 1943, Vichy prend le lycée sous sa tutelle et, dès lors, l’école dépend du Service de Contrôle Social des Étrangers. En 1945, la Croix-Rouge ressuscitée passe sous le contrôle du gouvernement de la Pologne « populaire » et finance le lycée.
Octobre 1940 à novembre 1941
Les autorités polonaises considèrent le lycée comme un établissement secondaire d’État. L’assistance aux Polonais en France reposant intégralement sur la Croix-Rouge polonaise, le lycée est officiellement le Centre 56 bis du réseau des foyers de réfugiés polonais. La Croix-Rouge est responsable du lycée, de ses employés, de son financement.
Stanisław Zabiełło, un diplomate polonais considéré comme représentant non officiel du gouvernement en exil, coordonne les Bureaux d’administration des Polonais mis en place par Vichy et supervise les transferts de fonds en provenance du gouvernement polonais en exil à Londres, sous couvert de subventions d’organismes d’assistance. Ces fonds transitent le plus souvent par la Suisse.
Novembre 1941 à décembre 1942
Sous pression des Allemands, les autorités françaises procèdent à la dissolution de la Croix-Rouge polonaise et à son remplacement par le Groupement d’assistance aux Polonais en France (GAPF) dont l’organisation est exclusivement polonaise. Son président est Zygmunt Lubicz-Zaleski.
Le GAPF tient à ce que ses centres les plus importants, dont le lycée de Villard, restent financièrement indépendants de l’État français. Il renonce volontairement aux aides publiques françaises « afin d’éviter toute ingérence d’agents étrangers dans le domaine de l’assistance à la jeunesse ».
Les circuits de financement sont inchangés.
Décembre 1942 à mai 1945.
L’occupation de la zone libre par les armées allemande et italienne complique la tâche du GAPF. Les contacts avec Londres et la Suisse deviennent moins réguliers et le GAPF estime que le parapluie des autorités françaises protégera mieux le lycée des mauvaises surprises que ne manquent pas de provoquer les circonstances nouvelles. Le GAPF demande au gouvernement de Vichy de prendre en charge le lycée en tant que foyer. Le lycée relève, dès lors, du Service du contrôle social des étrangers (SCSE) sur le plan administratif, et du ministère de l’Instruction publique sur le plan pédagogique.
Stanisław Zabiełło est arrêté. Si les fonds viennent toujours de Londres, une partie est maintenant acheminée illégalement depuis la Suisse. L’autre partie prend la forme de subventions fictives du Conseil de la Polonia américaine et transite par le consulat de Pologne au Portugal. Les deux circuits sont compliqués et risqués. C’est un transfert de fonds venus du Portugal qui aboutit à l’arrestation de Zygmunt Lubicz-Zaleski en mars 1943.
Mai 1945 à juin 1946.
La Croix-Rouge polonaise sort de la clandestinité. Depuis Londres, elle reprend en charge le financement du lycée. Bientôt, elle passe sous le contrôle politique et financier du nouveau gouvernement communiste, dit « de Lublin ». Revenu de déportation, Lubicz-Zaleski s’inquiète et essaye de trouver d’autres sources de financement et d’échapper ainsi au contrôle de Lublin. En vain.
Zygmunt Lubicz-Zaleski, directeur - Des Résistants polonais en Vercors, 2011.
De 1941 à 1943, le GAPF se développa et couvrit plus de domaines que la Croix-Rouge polonaise auparavant. Notre activité ne se voulait pas exclusivement philanthropique. Toute initiative qui avait une chance de se concrétiser, que ce fût dans le domaine de l’industrie, de l’artisanat, des sciences, de l’édition, de l’enseignement ou de l’art, pouvait compter sur notre aide. Je plaçais toujours en tête de nos préoccupations la jeunesse, tant celle des écoles comme Villard que celle des universités. Je considérais qu’à long terme c’était le secteur le plus porteur… Le lycée s’occupait également des jeunes Polonais en universités. Parallèlement, je parvins à faire fonctionner à nouveau normalement les lectorats de polonais dans les universités de Grenoble, Lyon, Toulouse, Montpellier, Clermont-Ferrand.