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Année 1940
Les chapitres
La France et la Pologne développent au fil des siècles des relations privilégiées. La France, patrie des droits de l’homme, est l’une des destinations privilégiées des réfugiés politiques polonais du XIXe siècle. L’École nationale polonaise de Paris est fondée. Dans les années 1920, la France accueille près d’un demi-million d’immigrants, principalement mineurs et ouvriers agricoles. L’École de Paris a disparu. Comment la refonder et où ?
La Pologne est envahie, puis la France. Un premier lycée polonais devait être créé à Amiens, ce sera à Paris pour une courte année. Les Polonais n’acceptent pas la défaite : il faut continuer le combat et s’occuper des réfugiés. Parmi eux, de nombreux jeunes – et moins jeunes – doivent poursuivre leurs études. Un nouveau lycée est créé à Villard-de-Lans. Il est pris en charge par la Croix-Rouge polonaise.
Originaires de France ou de Pologne, quelque huit cents élèves, professeurs et employés, se succèdent dans les murs du lycée. Les professeurs sont plutôt jeunes et se révèlent d’une grande qualité. Les premiers élèves sont principalement des soldats démobilisés, évadés de camps de prisonniers ou réfugiés de guerre. Les effectifs sont complétés avec quelques enfants issus de l’émigration d’avant-guerre, originaires de la région ou des bassins miniers de toute la France.
Les programmes scolaires sont basés sur ceux des écoles polonaises, mais s’adaptent à la réalité française ; en fin de cycle, le « Matura », reconnu équivalant au Baccalauréat, donne accès à l’université et aux écoles militaires d’officiers. Pour améliorer l’ordinaire, une ferme de douze hectares est louée et les élèves participent aux travaux des champs. L’activité culturelle est intense. Le lycée contribue à la conservation de la culture polonaise qu’il partage et diffuse autour de lui.
Le lycée est un lieu de renouveau moral, intellectuel, spirituel, patriotique et humaniste. Le lycée est aussi une école de caractère. Les règles strictes qui régentent la vie quotidienne sont l’expression d’une discipline indispensable au désir d’incarner la patrie. Entre communautés française et polonaise, une certaine méfiance existe, mais tous partagent les mêmes conditions de vie difficiles. Avec le temps, la méfiance laisse place à la curiosité, puis à la sympathie et au respect.
Dès l’automne 1940, jeunes et adultes, garçons et filles mènent des actions de « résistance », avant même que le terme n’existe. Ils participent aux mouvements polonais (POWN) et français, organisent les passages vers la Grande-Bretagne via les Pyrénées pour y rejoindre l’Armée polonaise. Dans la tempête des années 1943 et 1944, en Vercors, en Normandie et ailleurs, déportations et combats font de nombreuses victimes.
Dans une France libérée, le lycée retrouve une certaine normalité, mais la joie de la libération est troublée par la formation, en Pologne, d’un gouvernement contrôlé par l’URSS. En juin 1946, le lycée, passé sous la coupe du nouveau pouvoir, ferme ses portes dans une ambiance pénible. Élèves et professeurs se dispersent. Faut-il retourner au pays et le servir, même sous le joug communiste, ou refaire sa vie ailleurs ?
En Pologne, France, Grande-Bretagne, Australie, États-Unis ou ailleurs, chacun choisit sa route, marqué à jamais par l’histoire commune vécue et par les valeurs partagées. Depuis 1976, ils se retrouvent chaque année à Villard pour se souvenir et construire la mémoire de ces années exceptionnelles. Ils s’appellent entre eux et à jamais : les Villardiens.
La plaque commémorative dévoilée en 1976 sur un mur de l’hôtel du Parc et du Château est la première d’une longue série d’actions pour construire la mémoire du foyer des libertés que fut le lycée polonais Cyprian Norwid. Cette mémoire s’inscrit dans le paysage urbain comme dans des livres et films. Expositions et conférences apportent leur regard et leur voix et honorent ces Villardiens qui se battirent pour leur liberté et pour la nôtre.